Ma saison la plus difficile à vie

Billet de Myles Creran, ambassadeur de la Marche de l’espoir

La vie m’a lancé une première balle courbe à 12 ans, lorsque j’ai perdu la vue du côté droit.

Joueur de champ intérieur, j’attendais impatiemment d’embarquer sur le terrain lors d’un tournoi. La perte de vision est toutefois survenue avant même que je ne puisse croiser le marbre. Les médecins ont d’abord pensé que ce trouble était causé par une égratignure sur la cornée ou la chaux du terrain de baseball, mais le diagnostic de SP est tombé quelques mois plus tard.

Je n’ai pas compris tout de suite la gravité de la situation. J’avais 12 ans, je rêvais d’accéder aux ligues majeures, et je voulais à tout prix retourner sur le terrain. Après quelques mois, j’ai réussi à convaincre mes médecins de me laisser jouer de nouveau tout en prenant certaines précautions. Ultimement, ma vision s’est rétablie, et la SP s’est mise en veilleuse. La vie a continué, et la présence de la SP dans ma vie s’est limitée à des visites occasionnelles chez le médecin.

La partie se corse

Peu après mon 16e anniversaire, j’ai perdu l’usage de mon corps, du milieu de la poitrine jusqu’aux pieds. Une sensation d’engourdissement si profonde a envahi mes mains et mes jambes que j’arrivais à peine à les bouger. Je me traînais les pieds, parce que la douleur était trop grande quand je les levais du sol.

Pour le joueur de baseball en moi, la perte de mes mains et de mes jambes était une véritable agonie. J’étais découragé à l’idée de ne plus jamais pratiquer mon sport préféré. Contraint d’accepter mon sort, j’étais complètement démoli.

Jusque-là, la SP ne m’avait jamais dérangé. Puis, du jour au lendemain, j’ai compris à quel point ma vie pourrait être difficile. Soudainement, je me suis senti différent des autres; je souffrais d’isolement et j’étais en colère.

Les yeux sur la balle

Le temps a passé, mais mes symptômes ne sont jamais complètement disparus. Mon agonie s’est mutée en un profond agacement, la fatigue et l’engourdissement étant devenus des ennemis qui ne me lâchaient pas. J’étais vidé mentalement.

Malgré ces difficultés, je savais que je devais trouver un moyen de continuer de pratiquer le sport que j’aimais tant. Je me souviens d’un moment décisif, un jour où les symptômes physiques étaient particulièrement présents : je me suis demandé si le baseball en valait vraiment la peine. Mon corps souffrait horriblement, mais j’étais incapable d’abandonner mon rêve. La douleur était temporaire, mais si je laissais tomber le baseball, j’allais le regretter toute ma vie.

J’ai donc commencé à fréquenter le centre d’entraînement. La première journée, je n’ai même pas réussi à parcourir un kilomètre et demi en marchant.

Je sentais la rage dans mes veines, mais je savais que je devais trouver la force mentale de surmonter la douleur. Jour après jour, je suis remonté sur le tapis roulant, déterminé à marcher plus longtemps et plus rapidement que la veille. J’ai persisté jusqu’à ce que je commence à jogger, puis à courir et, finalement, à sprinter. Après un mois de séances d’exercice quotidiennes, je courais 1,6 kilomètre en 6 minutes et 30 secondes, moi qui quelques semaines plus tôt avais peine à marcher.

J’ai continué à m’entraîner comme une bête jusqu’au début de la saison de baseball. Pour une personne atteinte de SP, c’est tout un défi de jouer au baseball quand il fait 30 °C à l’extérieur ou d’attraper une balle sans sentir ses mains. Malgré tout, j’ai réussi à faire mentir mes médecins, qui pensaient que je perdrais bientôt l’usage de mes jambes. Quatre ans plus tard, j’ai l’immense bonheur de dire que je suis joueur de champ intérieur au sein de l’équipe des Dinos de l’Université de Calgary.

Une approche équilibrée au marbre

Tout comme je peaufine mon jeu au marbre, j’ai dû faire des ajustements pour mieux vivre avec la SP. La maladie fait partie de moi, et j’ai appris à m’adapter à sa présence. Aujourd’hui, mes mains sont un peu engourdies et mes jambes manquent un peu de force, mais je vais bien.

Je ne dirai pas que mon parcours a été facile; ce serait un mensonge. Mes jambes m’ont parfois lâché pendant que je courais vers le premier but. J’ai ressenti des chocs, des tremblements, de la fatigue et des engourdissements. L’automne dernier, j’ai manqué la plupart des entraînements, mais je me suis quand même présenté sur le terrain presque tous les jours pour encourager mon équipe.

Les épreuves que j’ai traversées m’ont appris à m’adapter. Les jours où je me sens fragile, j’apporte ma cane à l’entraînement. Je prends une pause quand j’en ai besoin. Certains jours, je prends congé parce que mon corps ne m’écoute pas. Je préfère me reposer pour être d’attaque le lendemain.

Pour l’amour du sport

Mon combat contre la SP m’a montré à quel point j’aime le baseball. Chaque journée, qu’elle soit bonne ou mauvaise, est l’occasion de mettre les pieds sur le terrain et de pratiquer le sport que j’aime.

Je n’oublierai jamais mon retour au jeu après mon absence l’automne dernier. À la première balle au sol, j’ai sprinté et plongé comme jamais auparavant. Mon cœur était sur le point d’exploser de bonheur quand j’ai senti la balle dans mon gant. Je me souviens m’être levé et avoir pensé, en balayant la chaux de mon uniforme : « C’est bon d’être de retour au jeu. »

Le baseball me donne une raison de vaincre la SP. Je me sens bien aujourd’hui, et après tout ce que j’ai traversé, je profite pleinement de chaque instant. Je vais pratiquer le sport que j’aime jusqu’à ce que la SP m’en empêche.

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