Face-à-face avec la SP : le parcours de Donavon

À Shaunavon, en Saskatchewan, le hockey, c’est du sérieux. Selon le Globe and Mail  et CBC, cette collectivité agricole de 1 800 habitants qui se trouve à une heure de route de la frontière avec l’Alberta et le Montana est une pépinière à hockeyeurs. Vous connaissez sans doute quelques joueurs de hockey professionnels originaires de l’endroit, comme Hayley Wickenheiser, Braydon Coburn, Kole Lind, Jayden Schwartz, Bryan Trottier, Zach Smith, Dyson Stevenson et Kale Kessy, pour ne nommer que ceux-là. Beaucoup s’attendaient à ce que Donavon Henrion s’ajoute à la liste. Après tout, il évoluait dans la Ligue de hockey senior à 15 ans, affrontant des adversaires de 25 à 35 ans.

« Des recruteurs se déplaçaient pour me voir à l’œuvre, je recevais des lettres d’invitation à des camps [de hockey] junior et des appels [de directeurs généraux]. Je ne savais plus où donner de la tête. C’est à cette époque-là – vers 2010 – que mes premiers symptômes de SP sont apparus. »

Même si elle compte peu d’habitants, Shaunavon affiche un taux élevé de SP. Donavon a participé à la Marche SP de Eastend, municipalité située à proximité de Shaunavon, pendant de nombreuses années en appui à son oncle, qui vit lui aussi avec la SP. Bien avant de recevoir lui-même un diagnostic de SP, en 2016, Donavon présentait, sans le savoir, des symptômes de cette maladie.

« Lors de ma dernière saison de hockey junior, j’étais incapable de patiner vers l’arrière. J’ai commencé à me poser des questions. Je sais que je suis capable. Est-ce que je suis devenu un mauvais joueur de hockey? Je me fatiguais très rapidement et j’étais toujours courbaturé. Je consommais tellement d’antidouleurs en vente libre que mon entraîneur, à un certain point, ne voulait plus m’en donner. Lors d’un voyage au Mexique, mes pieds sont devenus engourdis. La sensation de picotements ne m’inquiétait pas trop, car j’arrivais encore à courir. J’ai pensé que c’était une blessure de hockey. J’avais seulement 21 ans. »

Lorsqu’il a commencé à avoir des troubles de la vue, Donavon a consulté un optométriste, qui n’a rien trouvé d’anormal. Même constat du côté des médecins des cliniques sans rendez-vous qu’il a visitées.

« J’étais frustré de chercher à comprendre ce qui m’arrivait et de ne pas obtenir de réponse. Je me suis tourné vers l’alcool et les antidouleurs. J’ai sombré dans la dépression. L’alcool engourdissait la douleur et m’a permis d’oublier pendant un moment que quelque chose n’allait vraiment pas. Je buvais cinq jours par semaine, et je pouvais vider une caisse de bières par soir. Je commençais aussi à avoir des problèmes de coordination. »

Donavon se souvient parfaitement du soir où il a compris qu’il ne pouvait plus ignorer les symptômes. Il s’était rendu à une patinoire extérieure près de la maison.

« J’ai lacé mes patins, j’ai embarqué sur la patinoire et – BOUM – je suis tombé. J’ai tenté plusieurs fois de me relever, en vain. Je me suis alors assis sur la glace, j’ai sorti mon téléphone et j’ai appelé ma mère. Je lui ai dit que je devais voir un médecin, parce que je n’arrivais plus à patiner. La peur m’envahissait. Je perdais la maîtrise de mon corps, et j’ignorais pourquoi. »

Après de nombreux symptômes troublants, Donavon a obtenu un rendez-vous pour subir un examen par IRM. En 2016, il a reçu un diagnostic de SP. Sa mère et lui ont discuté des options de traitement avec l’équipe médicale de la clinique de SP de Saskatoon. Donavon devait absorber une grande quantité d’information après être demeuré sans réponse pendant longtemps. Durant le trajet de quatre heures qui les ramenait à Shaunavon, la mère et le fils sont restés très silencieux.

« J’avais toujours eu une grande assurance, j’étais bon dans les sports… mais tout ça appartenait au passé. Je n’avais même pas un mot à dire. Ma vie d’avant venait de disparaître en un clin d’œil. »

Donavon étant une figure bien connue du hockey et des cercles sportifs de Shaunavon et des environs, plusieurs collectes de fonds ont été tenues à l’occasion de tournois de balle lente et de camps de hockey de sa ville natale pour aider le jeune homme à couvrir ses frais de déplacement, puisqu’il devait se rendre à Saskatoon pour subir ses traitements à l’unique clinique de SP de la Saskatchewan. Toute la ville s’est déplacée pour manger des crêpes lors d’un déjeuner-bénéfice. Lorsque deux amis proches se sont mariés, ils ont insisté pour lui remettre l’argent qu’on leur avait offert en cadeau lors de la cérémonie. Malgré cet élan de solidarité, le traitement initial contre la SP de Donavon ne donnait pas de résultats.

Lorsque Donavon a revu son médecin à Saskatoon, celui-ci lui a recommandé un traitement à haute efficacité qui supprime la réponse immunitaire et qui est généralement prescrit aux personnes qui n’obtiennent pas de résultats avec les autres médicaments modificateurs de l’évolution de la maladie.

« Je n’avais rien à perdre. La maladie progressait de plus en plus vite. »

Donavon a trouvé le traitement épuisant. Il a reçu des corticostéroïdes par perfusion pendant cinq jours, avant de prendre un médicament modificateur de l’évolution de la maladie. L’année suivante, il a subi le même traitement, mais les perfusions ont duré seulement trois jours. Il a perdu 18 kg.

« Par la suite, mon équilibre s’est amélioré, et je n’avais plus l’air ivre lorsque je marchais. Entre mes deux traitements, ma mère a reçu un diagnostic de cancer. Elle s’est rendue à Saskatoon pendant six semaines pour suivre ses traitements, et je suis resté seul à la maison. J’ai trouvé l’expérience difficile, car nous sommes proches. Nous n’avons que l’un et l’autre. »

Donavon ne prétend pas que son parcours a été facile, mais il fait preuve d’une résilience remarquable. Les choses se sont améliorées depuis le soir où il est tombé sur la patinoire, grâce à ses efforts et au soutien de son milieu, qui a dépassé les murs de l’aréna. Donavon prête main-forte à un agriculteur pendant la saison de récoltes, il s’entraîne six jours par semaine avec un ami qui est également un entraîneur personnel, et il a commencé à jouer de la guitare, ce qui lui a permis d’améliorer sa coordination. Il aime bien bricoler des moteurs de toutes sortes avec un ami de la famille. Il est souvent marqueur lors de matchs de la ligue de hockey mineur du coin et il est toujours prêt à donner un coup de main à un entraîneur de hockey ou de football. Même s’il rêve de patiner de nouveau un jour, rien ne pourra jamais tenir Donavon loin de l’aréna.

« Avant les perfusions, j’en étais presque rendu à utiliser un fauteuil roulant. J’aurais dû me déplacer avec une canne, mais je ne l’ai jamais fait. J’étais trop têtu. Les résultats de mon plus récent examen par IRM montrent que mes lésions ont diminué et qu’elles ne sont pas toutes actives. C’est la meilleure nouvelle que j’ai eue depuis quelques années! »
 
La Marche SP Croix Bleue de la Saskatchewan a pris un nouveau sens pour Donavon depuis qu’il sait qu’il a la SP.
« Auparavant, je n’étais qu’un simple sympathisant. Il est impossible de savoir ce qu’est la vie avec la SP si on n’a pas à vivre cette réalité. La Marche SP me rappelle qu’il y a des gens qui m’aiment et que je ne suis pas seul dans la lutte que je mène contre la sclérose en plaques. Elle m’incite à ne jamais abandonner. »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.