J’ai reçu un diagnostic de SP en 2011. Certains se souviennent du jour de leur diagnostic comme d’un anniversaire. Ils peuvent vous dire le temps qu’il faisait, les circonstances de l’annonce et les mots qui ont été prononcés. Dans mon cas, tout est flou. Je pense que c’était l’été. Je sais que ma vie a changé ce jour-là.
J’avais à peine 21 ans quand les premiers symptômes se sont manifestés. J’avais réglé mon réveil à 6 h afin d’étudier pour un examen et, alors que j’étais à la bibliothèque de l’université, une drôle de sensation est apparue dans ma main droite. La sensation a empiré pendant les deux heures suivantes, et ma main est devenue complètement engourdie. J’ai dû tenir mon crayon à deux mains pour terminer l’examen.
Après une semaine d’engourdissements dans la main, je me suis rendue dans une clinique sans rendez-vous pour consulter un médecin généraliste, qui m’a fait passer une batterie de tests, dont une analyse comparative des côtés droit et gauche de mon visage.
« Votre visage est asymétrique », m’a dit le médecin.
« Je suis faite comme ça », lui ai-je répondu.
« Vous devez voir un neurologue », a-t-il conclu.
Mon premier examen d’IRM m’a traumatisée. Pas parce que je suis claustrophobe ou que l’appareil émet des sons qui rappellent ceux d’un modem commuté, mais parce que je me sentais vulnérable devant la possibilité de recevoir un diagnostic de maladie chronique ou incurable.
J’ai fait une crise de panique pendant que j’étais à l’intérieur de l’appareil, ce qui fait que les résultats n’ont pas été concluants. Le neurologue m’a donc prescrit des comprimés d’Ativan et un deuxième examen, cette fois avec du gadolinium pour améliorer le contraste des clichés.
J’ai reçu un appel du neurologue après ce deuxième examen. Il était 22 h, et je venais de terminer un quart à mon emploi dans la vente au détail.
« Ce n’est rien d’alarmant, nous allons surveiller la situation », a dit mon neurologue.
Quel soulagement, ai-je pensé.
« Donc, je n’ai pas la SP, mais nous allons faire un suivi? », ai-je demandé.
« Je me suis mal exprimé : vous avez bien la SP », a-t-il répondu.
Mon cœur s’est arrêté de battre. J’ignorais tout de la SP, à part le fait que c’était une maladie terrible qui allait me clouer à un fauteuil roulant. Je croyais, à tort, que la SP ne s’attaquait qu’aux personnes âgées et qu’elle menait invariablement à une perte de mobilité.
Je suis rentrée à la maison, déterminée à taire mon diagnostic. J’ai tout gardé pour moi, et les années qui ont suivi ont été sombres. Je vivais dans le secret, craignant les stigmates de la maladie.
Je me suis finalement décidée à rencontrer une infirmière spécialiste de la SP, qui m’a renseignée sur les options de traitement. Toutes consistaient en des injections et entraînaient des effets secondaires terrifiants. Dépassée, j’ai quitté le bureau du neurologue ce jour-là sans plan de traitement.
Heureusement, mes symptômes de SP étaient peu prononcés pendant cette période. J’avais environ une poussée par année, qui se manifestait généralement par des picotements et des engourdissements dans les mains ou les pieds.
Ma pire poussée s’est toutefois produite en 2013 : j’ai alors perdu la vue du côté droit en raison d’une névrite optique. J’ai commencé par voir un point et avoir mal à la tête avant de devenir complètement aveugle de l’œil droit.
J’ai malgré tout continué à cacher mon diagnostic. La perte de vision était un des symptômes les plus effrayants que j’avais ressentis à ce jour, mais, têtue que j’étais, je l’ai vécu seule.
Pendant les quatre années qui ont suivi le diagnostic, je n’ai pas compris à quel point mon secret nuisait à ma santé mentale. Je souffrais d’anxiété et de dépression, et je me défoulais sur mes amis ou mes proches, qui ne comprenaient pas ce qui se passait.
J’avais des pensées suicidaires chaque fois que mon copain partait travailler, et je suis devenue extrêmement anxieuse à l’idée de rester seule à la maison. Mon incapacité à simplement mettre fin à mes jours me répugnait. Je me trouvais lâche d’avoir peur de la mort qui, à l’époque, me semblait pourtant être une meilleure option qu’une vie avec la SP.
Mon anxiété envers mon corps n’est pas disparue quand la SP est apparue. Quand je me regardais dans le miroir, j’étais dégoûtée par ma prise de poids.
J’ai d’abord entrepris de faire de l’exercice pour perdre du poids, mais l’activité physique a eu pour effet d’améliorer mon humeur et de me libérer des griffes de la dépression. Je suis convaincue que l’exercice m’a sauvé la vie.
Lorsque ma santé mentale s’est améliorée, je me suis sentie capable de communiquer avec la Société de la SP. Je me suis d’abord inscrite comme bénévole à la Marche de l’espoir Jayman BUILT. J’étais loin de me douter que cet événement allait changer ma vie et mon parcours avec la SP.
À mon arrivée à la Marche, j’ai vu des participants qui portaient des dossards où on pouvait lire « Je marche parce que j’ai la SP », ou encore « Je marche pour ma mère », « … ma tante », « … mon frère ». Tous affichaient ouvertement leur lien avec la SP. Mon expérience à la Marche de l’espoir m’a aidée à comprendre que si je racontais mon histoire, je pourrais recevoir du soutien et de l’amour. Mes proches pourraient eux aussi porter des dossards avec la mention « Je marche pour ma fille », « Je marche pour ma femme » et, un jour, « Je marche pour ma mère ».
C’est alors que j’ai décidé de commencer à annoncer mon diagnostic. J’ai rapidement été invitée à prendre la parole lors d’événements liés à la SP. Chaque fois que je parlais de mon parcours, quelqu’un venait me voir ensuite pour me faire part de sa propre expérience. J’ai alors compris les bienfaits de livrer mon témoignage, mais j’ai surtout pris conscience qu’en prenant ainsi la parole, j’avais l’occasion de faire en sorte que personne d’autre ne traverse cette épreuve seul. Quand j’ai été nommée responsable de la Marche de l’espoir Jayman BUILT, j’ai raconté mon histoire devant 1 500 participants. Mais je n’avais toujours pas dévoilé mon diagnostic à mes parents.
Quand je leur ai finalement annoncé en 2018 que j’avais la SP, ma mère s’est montrée étonnamment calme et rassurante. Mon père, qui venait de perdre sa seconde femme en raison du cancer, a eu peur de me perdre également. Mon expérience auprès de la Société de la SP m’avait toutefois permis d’en apprendre plus sur les avancées de la recherche sur la SP, ce qui m’avait donné espoir en l’avenir. Quand j’ai annoncé le diagnostic à mes parents, j’étais donc en mesure de leur transmettre cet espoir.
La SP fait partie intégrante de ma vie. Elle a influé sur mon choix de carrière, mes relations et la planification de ma famille. Quand j’ai appris que j’avais la SP, je savais que ma vie allait changer du tout au tout, mais il m’a fallu des années pour être reconnaissante des changements que la SP a entraînés. Je sais aujourd’hui que j’ai le pouvoir de changer les choses et d’aider les autres en parlant de mon expérience et que, ce faisant, je trouverai une communauté de personnes qui veulent être là pour moi. Finalement, je ne changerais rien à tout ce que j’ai vécu jusqu’à présent, car chaque moment passé a contribué à forger la personne que je suis maintenant.
En moyenne, onze Canadiens reçoivent un diagnostic de SP chaque jour. Changez le cours des événements pour les quelque 77 000 personnes de notre pays qui vivent avec la SP, comme Susan. Passez à l’action en manifestant votre soutien dès aujourd’hui :