Billet de Lizelle Mendoza, blogueuse invitée
À 17 ans, je rêvais de faire les meilleurs macarons du monde, d’apprendre à nager, de devenir une yogi et de faire un saut en parachute – malgré ma peur des hauteurs et des montagnes russes. Mais par-dessus tout, et d’aussi loin que je me souvienne, j’ai rêvé d’être une infirmière. Alors, lorsqu’on m’a demandé d’abandonner mes cours en soins infirmiers, l’année dernière, j’étais atterrée.
J’avais raté de 1,33 % la note de passage d’un de mes cours. Si seulement je m’étais écartée de cette note de 9 ou de 10 %, j’aurais compris, mais pour 1 %! Je ne pouvais pas le croire. Je suis allée voir ma professeure pour savoir où j’aurais pu faire mieux, et elle m’a dit que mes longues réponses aux questions de mon examen final n’avaient pas été présentées là où elle aurait aimé les trouver. Par la suite, le directeur du département m’a suggéré d’envisager une autre carrière.
J’ai eu l’impression qu’on venait de m’arracher mon rêve. Et en entendant dire que je devrais changer d’orientation, il me semblait que je perdais tous mes moyens. Me faire juger par une personne qui ne m’avait jamais rencontrée m’a donné envie de lui dire : « Vous ne me connaissez pas, vous ne savez rien de ce que j’ai vécu et vous osez décider de mon avenir? » Il n’en fallait pas plus pour je sombre dans une profonde dépression.
De toute ma vie, je n’avais jamais été aussi désespérée, sauf le jour où, neuf ans plus tôt, j’ai reçu un diagnostic de SP. À 18 ans, je me posais plein de questions. Je n’avais pratiquement pas entendu parler de cette maladie. Nous n’avions aucun antécédent familial de sclérose en plaques et nous ne connaissions personne qui en était atteint. Mes parents ont émigré des Philippines, et dans ce pays, le taux de SP est très faible, et cette maladie, très peu connue. Ils affichaient donc un déni total. De par leur culture, les Philippins n’ont pas l’habitude de se tourner vers la médecine occidentale; ma mère, qui est dotée d’une grande spiritualité, n’y faisait pas du tout confiance.
J’ai fait toutes les recherches possibles sur la SP et, un soir, quelques semaines avant mon 23e anniversaire, j’ai invité mes amis les plus intimes pour leur apprendre la nouvelle. Cette soirée a été remplie d’émotions, et je me souviens encore de l’étonnement que j’ai alors pu lire sur leur visage. J’avais très peur qu’ils sortent de ma vie, mais c’est tout le contraire qui s’est produit.
Ce fut un moment décisif pour moi. J’ai alors cessé de craindre de parler de mon état et j’ai commencé à chercher à m’impliquer davantage au sein de la collectivité de la SP.
Moins de deux ans plus tard, ma vie a pris une tournure que je n’avais jamais imaginée.
Peu après le diagnostic, j’ai commencé à communiquer par courriel avec une responsable des services et des programmes de la Société de la SP. Lorsque je lui ai raconté mon histoire, elle m’a proposé de devenir une ambassadrice de la SP, c’est-à-dire d’informer les gens sur la SP, de toutes sortes de façons. Du jour au lendemain, je me suis mise à porter mon message dans les écoles et les entreprises, à venir en aide aux membres de groupes de soutien et à parler de mon vécu avec des représentants du gouvernement habilités à améliorer le sort des personnes aux prises avec des incapacités. Je suis particulièrement fière de pouvoir transmettre à nos élus d’innombrables témoignages de personnes touchées par la SP, issues de toutes les régions du pays.
@lmend0za dr.marriott and me excited for the #mescams news pic.twitter.com/hlQ5pkBxgW
— Karen Lee (@Dr_KarenLee) January 29, 2015
En moins de deux ans, ma vie a pris une tournure que je n’avais jamais imaginée. À cette époque, le Dr Marriot, neurologue et cochercheur principal de l’étude MESCAMS, m’a invitée à prendre la parole à l’annonce de cette étude clinique. Pendant la visite du laboratoire avec les journalistes, j’en ai profité pour souligner tout l’espoir que ce projet de recherche nous avait insufflé, à ma famille et à moi. Devant les caméras et les microphones, j’ai déclaré que je considérais cette étude sur les cellules souches comme une chance pour les personnes touchées par la SP de vivre sans inquiétude. La question est passée de « et si… » à « quand et comment ».
Je veux faire savoir aux personnes atteintes de SP qu’elles ne sont pas seules.
Je mentirais si je vous disais que je ne crains rien. Je m’inquiète pour ma carrière et j’ai peur de ne pas pouvoir m’occuper de mes enfants comme ma mère l’a fait, si jamais j’ai le bonheur d’en avoir. Mais j’ai appris à vivre sans me faire de souci. Les expériences que j’ai acquises au sein de la collectivité de la SP me guident dans les autres domaines de ma vie – si j’ai pu transformer en force un diagnostic reçu à l’adolescence et partager cette force avec d’autres, je peux en faire autant à l’égard de mon avenir.
Je sais aujourd’hui que je ne laisserai personne m’empêcher d’être la personne que je veux être. Je serai une infirmière, peu importe le temps que cela prendra pour réaliser ce rêve. Je serai une bonne mère, et si quelqu’un essaie de me dire le contraire, eh bien, je ferai tout pour le démentir. J’ai découvert un programme d’études qui me permettra de devenir une spécialiste des soins de santé publique et de me porter à la défense de personnes qui ont vécu des expériences semblables à la mienne. Je suis actuellement sur la liste d’attente pour le cours d’infirmière auxiliaire autorisée, qui m’amènera à travailler environ 400 heures à ce titre avant de pouvoir me réinscrire au programme de baccalauréat en soins infirmiers et de pouvoir enfin me spécialiser dans le domaine de la santé publique. C’est plus long que ce que j’avais prévu, mais je suis bien décidée à parvenir à mes fins!
Je ne ferai peut-être jamais de saut en parachute, mais j’apprendrai à nager, je suivrai un cours de yoga et j’aiderai les gens à s’y retrouver dans le système de soins de santé. En fait, j’ai déjà commencé : j’organise, avec trois autres femmes atteintes de SP, une exposition sur le thème du bien-être, qui aura lieu plus tard cette année. Nous espérons ainsi réunir de jeunes adultes aux prises avec cette maladie et favoriser l’établissement de liens entre eux.
Je veux que les gens sachent que la SP peut frapper n’importe qui et que les personnes atteintes de cette maladie ne sont pas seules. Je veux qu’ils sachent aussi que les chercheurs tentent par tous les moyens de stopper la SP. Avec de l’aide et de l’amour, tout ira mieux! J’ai trimé dur pour y arriver, mais j’ai enfin réussi – je me sens libre.
« J’ai la SP, mais elle ne me possède pas. »
Quand j’ai reçu un diagnostic de SP, j’ai d’abord cru que j’allais mourir, que j’allais perdre mes capacités, que je ne pourrais plus jamais marcher ou parler et que je dépérirais lentement. Mais aujourd’hui, je sais qu’il existe deux types de SP : la SP cyclique et la SP progressive. J’ai aussi appris que des progrès avaient été accomplis sur les plans de la recherche, de la médecine et des services communautaires. De plus, grâce à de l’information et à des ressources adéquates, l’aide offerte dans notre pays aux personnes qui vivent avec des incapacités s’est grandement améliorée. Bien sûr, il reste encore beaucoup à faire, mais les gens travaillent fort pour s’assurer que les personnes qui vivent avec la SP aient tout ce qu’il leur faut pour vivre une vie épanouie et satisfaisante – la vie qu’elles devraient avoir, en somme.
Je crois que j’ai un tant soit peu participé à ces avancées. Il y a huit ans, mes amis les plus proches et moi avons formé l’équipe « Team Faith » dans le cadre de la Marche de l’espoir de notre région. À ce moment-là, j’ai incité mon groupe à venir en aide à un membre de ma famille en leur disant : « Nous devons faire quelque chose dans notre vie si nous voulons changer celle de quelqu’un d’autre ». Ce n’est que deux bonnes années plus tard que je me suis sentie capable de leur avouer que c’était moi qui avais la SP.
Aujourd’hui, j’ai 27 ans. Au fil des huit années dernières, j’ai appris à faire face à la SP à ma façon – à composer avec elle, à m’y adapter et à travailler avec elle. À chaque jour suffit sa peine. Tous les ans, lorsque l’hiver et ses -30 degrés font place au printemps à Winnipeg, mon espoir refleurit. Juste de voir tous ces gens venus participer à la Marche me laisse sans voix. Je trouve merveilleux qu’on reçoive autant d’aide, non seulement des gens de chez nous, mais de tous les Canadiens.
Cette année, j’ai travaillé avec d’autres ambassadeurs de la SP, comme Kayla, de Toronto, dont la vidéo « Viable » m’a vraiment touchée. Elle y disait : « J’ai la SP, mais cette maladie ne me possède pas ». J’ai déjà entendu cela, mais je n’ai eu que cette phrase dans la bouche récemment. Elle dit tout ce que je ressens à l’égard de cette maladie. Pour moi, la mise au point d’un moyen de guérir la SP signifierait l’invulnérabilité, ce qui permettrait de changer les « je ne peux pas » en « je peux ». Et tous ensemble, je sais qu’on y arrivera.
Native de Winnipeg où elle a grandi, Lizelle se dévoue depuis de nombreuses années à titre d’ambassadrice de la SP et de bénévole au sein de la collectivité de la SP. Elle poursuit des études à plein temps en soins infirmiers et rêve toujours d’œuvrer dans le domaine de la santé publique et de défendre les droits des personnes atteintes d’une maladie neurologique comme la SP. En attendant, elle occupe un poste de réceptionniste pour subvenir à ses besoins. À l’approche de la saison de la #Marchedelespoir, nous continuerons de vous parler d’elle et d’autres ambassadeurs de la #Marche de l’espoir de notre pays. Vous pouvez faire comme Lizelle et vous inscrire à la #Marchedelespoir de votre région aujourd’hui même. Pour qui marcherez-vous? Faites-le-nous savoir dans les commentaires.